Noémie, c'est "madame tout le monde" qui est arrivée en Bretagne non par hasard mais presque, en plein confinement. La sociabilité étant à cette période au tréfond du néant, elle s'est acheté une paire de chaussures de course, espérant découvrir un petit bout de la région dans la limite des restrictions imposées. Sans avoir jamais couru de sa vie, elle a commencé à enchaîner quelques kilomètres et s'apprête aujourd'hui à concourir auprès de grand triathlètes de notre génération l'ironman de Nice : le grand, le vrai, la distance reine !
Entretien avec Noémie Gerzé : participante à l'Ironman de Nice le 29 juin prochain
Salut Noémie, tu t’apprêtes à devenir une ironwoman cette année. L’heureux élu pour réaliser ce défi est l’ironman de Nice le 29 juin prochain. Comment te sens-tu à moins de deux mois de l’événement ?
Chaque jour qui passe me rapproche un peu plus du jour J et je commence à ressentir un début d’adrénaline et d’excitation, même s’il reste encore deux bons mois de prépa. Sinon je vais bien. Je reviens d’une semaine de stage intensive en Espagne. Je me sens prête à affronter cette épreuve après une longue préparation cet hiver. Je sais que je me suis construit un corps plus solide pour y arriver. Il n’y a pas un jour qui passe sans que j’y pense.
L'Ironman de Nice est l’un des triathlons les plus emblématiques du monde. C’est même la destination rêvée pour beaucoup de triathlètes. Qu’est-ce qui te séduit dans cette course ?
Pour mon premier Ironman, j’avais à cœur de choisir un beau parcours vélo car le temps que je passerai sur ce sport sera le plus important des trois. Et puis, le vélo est mon sport favori donc j’avais envie de privilégier le plaisir et de profiter du paysage. Aussi pour que le temps passe plus vite (rire) ! En plus, toutes les personnes qui ont fait Nice sont unanimes : il est magnifique. J’ai aussi choisi l’Ironman de Nice pour la symbolique puisqu’il est évidemment mythique. J’ajouterais le facteur météo qui a guidé mon choix : il devrait faire beau à cette période, même si ça peut devenir une difficulté s’il fait trop chaud.
Tu as dû suivre une préparation exigeante pour accomplir ce challenge sportif. Peux-tu nous en dire plus ?
J’ai fait le choix d’être accompagnée par un coach pour ma préparation. Je me sentais incapable de partir seule dans cette aventure, sans savoir quoi faire, quel volume, quels exercices, gérer une montée progressive de la charge, etc. J’aurais pu me documenter mais j’avais envie de quelque chose "clé en main".
Donc, je suis suivie à distance depuis septembre par Benjamin Pernet, un coach spécialisé pour les triathlètes longue distance. Il me fait des plans d’entraînements personnalisés toutes les semaines.
Es-tu satisfaite de ce suivi ? Comment gères-tu ton emploi du temps ?
C’est une vraie découverte pour moi d’avoir un coach qui me guide dans ma prépa, mais aussi qui m’apprend l'objectif des exercices, l’intérêt des séances et des enchaînements de blocs de préparation. Cette longue préparation est l’occasion de progresser bien sûr, c’est le but, mais aussi d’en apprendre beaucoup sur moi.
Il y a souvent eu des séances cet hiver durant lesquelles j’ai réussi à puiser de la motivation au fond de moi, parce que je sais pourquoi je le fais, je sais ce que je veux au bout de l’effort. Et aussi parce que le coach vérifie les séances (rire) ! Ce n’est pas toujours évident de tout faire, l’agenda est très organisé voire millimétré. Le moindre petit imprévu fait bouger tout le tetris et les séances doivent être réalisées sans faute, mais je me donne les moyens de réussir.
Peux-tu nous donner un exemple de semaine type d’entraînement pour l’ironman ?
Pour te donner une idée du volume à réaliser par semaine, j’avais en moyenne 3 séances de chaque discipline. Des séances de natation pour travailler la technique, d’autres pour l’endurance, à vélo des séances force et de vitesse sur home traîner et d’autres sorties d’endurance et en course à pied : vitesse, endurance et footing.
Cet hiver j’avais jusqu’à 4 séances de course à pied par semaine car c’est le sport où j’ai le plus de marge de progression et comme mon entourage a l’habitude de me dire, "l’Ironman commence au marathon". En parallèle je maintiens aussi une séance de pilate par semaine pour travailler mes muscles en profondeur et être plus solide. Cela représente un volume d’environ 10/12h par semaine.
Ces deux dernières années tu as participé à différents triathlons, dont deux half ironman aux Sables d’Olonnes en 2023 et à Aix en Provence en 2024. Comment se sont déroulées ces premières expériences longue distance en compétition ?
J’ai adoré mon premier half aux Sables. Inscrite un peu par hasard, par défi, je me suis retrouvée à découvrir l’expérience du long et à beaucoup aimer. Toutes les conditions étaient réunies ce jour-là : une belle météo, la forme physique, pas de pépin et beaucoup de supporters car c’était une course avec de nombreux sportifs du club. On pouvait se croiser sur la course à pied. J’ai versé ma petite larme à l’arrivée. J’avais suivi la préparation avec le club, j’avais été assidue et ça avait payé.
Pour Aix en Provence j’ai été moins rigoureuse dans ma prépa et ça ne s’est pas passé comme espéré, notamment sur le vélo qui est le sport que j’adore. Ce jour-là je n’étais "pas dedans", c’était dur. Mais la course à pied dans la ville était superbe et j’avais progressé par rapport aux sables donc ça m’a permis de me rebooster. En finissant Aix je savais que je signerais pour la distance reine l’année suivante et nous voici en 2025 !
C’est ce qui t’a donné envie de t'élancer sur la distance reine de la discipline ou était-ce un rêve d’enfant ?
Je me suis mise au triathlon il y a 4 ans un peu par hasard à cause ou grâce au Covid. Après un S, un M et deux L sur lesquels j’ai vu que j’aimais le long j’ai décidé de sauter le pas pour la distance complète !
Tu es membre du club du Triathlé Vannes, depuis combien de temps es-tu licenciée ?
Je suis licenciée depuis 3 ans. J’ai commencé seule à m’entraîner et j’ai rejoint le club en 2022.
Comment se déroulent les séances d’entraînement au sein du club ?
Un plan d’entraînement est envoyé aux adhérents toutes les semaines et chacun est libre de réaliser le contenu selon ce qu’il prépare. Nous avons plusieurs séances encadrées par semaine : pour la course à pied sur la piste de Kercado, une séance de renfo/ footing, une séance de natation et de vélo le week-end. Pour le reste nous avons accès aux infrastructures sur d’autres créneaux. Je m’entraîne également beaucoup de mon côté cette année tôt le matin ou le midi par rapport à ma prépa spécifique.
Il y a tout juste 6 ans, tu commençais la course à pied en participant aux bRUNchs (aujourd’hui RAVITTO) organisés par Tonton Outdoor. Ta motivation était la découverte, car tu aimais "courir pour le plaisir mais pas pour la compétition", nous avais-tu confié. Comment s’est effectuée ensuite la transition vers le triathlon et donc des courses officielles ?
J’ai découvert TTO avec un run organisé par Salomon au printemps 2021 je me souviens, puis ensuite j’ai participé aux bRUNchs.
C’est vrai que j’ai acheté ma première paire de baskets en 2020 car je venais d’arriver à Vannes. 6 mois plus tôt je ne connaissais personne, les clubs/assos étaient fermées avec le Covid alors j’ai décidé de choisir la facilité en m’achetant une paire de baskets pour aller sur les sentiers en bas de chez moi. Je me suis créée des auto défis "courir 30min sans m’arrêter / courir 10km / courir un semi" tout ça seule. Et puis j’aimais aussi nager, alors habitant à la mer j’ai décidé d’investir dans une combinaison de triathlon. Une fois que j’étais équipée pour 2 sports sur 3, je me suis demandé si j’aimais le vélo. Mes parents m’ont offert mon premier vélo à Noël 2021 et là ça été une vraie découverte ! Il ne restait plus qu’à tester la combinaison des 3 sports ! C’est comme ça que j’en suis arrivée au triathlon. J’ai aussi rencontré des personnes qui en faisaient depuis longtemps ce qui m’a motivée à m’inscrire à des courses et au club.
Le plaisir et pas la compétition, ça, ça n’a pas changé ! Finir cet Ironman sera une vraie compétition avec moi-même avant tout ! (sourire).
Ce sport demande une grande polyvalence et une maîtrise des 3 disciplines (course à pied / cyclisme / natation). Tu y as déjà plus ou moins répondu mais, as-tu une vraie préférence et des difficultés sur l’une d’entre elles ?
Ma discipline préférée est sans aucun doute le vélo, et la plus difficile est la natation.
Justement, la natation peut parfois être perçue comme un frein chez les débutants et les débutantes ? Quels sont tes conseils pour les "triathlètes en herbe" à ce sujet ?
Ne pas avoir peur d’aller prendre des cours pour adultes il n’y a pas d’âge pour apprendre ou se perfectionner. La natation est un sport technique. Et aller nager régulièrement. Personnellement j’ai vu des progrès lorsque je réussissais à nager au moins 3 fois par semaine cet hiver avec des séances encadrées.
Penser aussi à faire quelques séances en eau libre avant les premiers triathlons pour se réhabituer à la combinaison, le courant et les vagues.
En 2024, la part des femmes au sein de la FFTRI a atteint près de 31%, un record ! Peux-tu nous partager ton avis à ce propos ? Quelles en sont les raisons selon toi ?
Sûrement un effet JO. Je pense aussi que le triathlon et le vélo féminin se démocratisent. Les réseaux sociaux jouent un rôle dans cette augmentation selon moi. Il y a encore 4 ans je pensais que le vélo était un "sport de papy" et plutôt masculin. Finalement j’ai rencontré des femmes qui en faisaient et j’ai conclu que c’était génial comme sport en fait ! (rire)
On voit de plus en plus de triathlons féminin sur les réseaux, ça peut inspirer des gens ou en tout cas leur donner envie de tester.
Sur l’ensemble de tes entraînements, tu dois jouer avec ta forme physique et tes cycles menstruels. Comment gères-tu la fatigue, les douleurs ou les fluctuations de moral qui peuvent en découler ? As-tu des astuces à donner aux femmes sportives qui te lisent ?
Je suis plus sujette à la fatigue qu’aux douleurs, j’ai de la chance de ce côté.
La fatigue est une grosse part de la gestion de la prépa, c’est vrai ! Pour les baisses de moral j’essaye de passer au dessus. Je me connais, j’identifie les semaines qui seront plus difficiles ou plus irritables et je sais que ça passera. Mais les larmes de fatigue coulent aussi parfois, il ne faut pas rêver (rire) ! Ça fait du bien aussi.
Quels conseils pourrais-tu donner aux femmes qui souhaitent débuter la pratique du triathlon ?
Prendre des conseils d’autres femmes qui font du triathlon m’a beaucoup aidé pour démarrer. Je pense que ce sera mon meilleur conseil sur le sujet : s’entourer !
Merci beaucoup, Noémie, d’avoir pris le temps de répondre à nos questions. Nous te souhaitons une très belle fin de préparation et surtout, un ironman dans les meilleures conditions ! Nous te retrouvons de “l’autre côté de la course” sur la ligne d’arrivée. Les tontons et tatas sont de tout cœur avec toi. A bientôt !
Si vous avez aimé cet interview, vous aimerez également notre article sur les championnats d'ironman de François à Hawaï, à retrouvez sur Tonton Outdoor !